Lagrenouille

Ratage de science : c’est en sandalettes qu’il essaie de mettre 40 mentos dans 20L de soda

Encore un ratage de sciences d’anthologie : qui pourrait croire que cette expérience populaire du bonbon Mentos dans le soda puisse se terminer aussi mal ? Encore quelqu’un qui a eu de la chance après avoir essuyé une sacrée explosion !

En guise d’intro à son expérience devant sa bouteille remplie de 20 litres de Dr Pepper, il se contentera de dire « I take fourty mentos » (je prends quarante mentos), et puis, verse plus de la moitié de ses pastilles hors de la bouteille. Il a un sourire crispé, réalise deux pas maladroits et puis :

 

BOUM !

Le monsieur ne se rend pas tout de suit compte de ce qui est en train de se passer :

ratage de science : mentos et coca
Un petit temps de réaction avant de réaliser… Copie d’écran YouTube.

Et le Gif du moment clé, le moment où tout a basculé :

Fail Dr Pepper GIF

J’ai l’impression qu’il a même été soufflé par l’explosion, voyons le Gif au ralenti :

Animated GIF

Alors, que s’est-il passé ?

Une nucléation, une réaction en chaîne (ni plus ni moins) et une tuyère trop étroite.

En ce qui concerne la nucléation, j’avais déjà expliqué le principe sur ce blog mais voici un petit rappel : lorsque l’enrobage du Mentos entre en contact avec le liquide, il se dissout, ce qui a comme conséquence de multiplier les centres de formation de gaz carbonique. En effet, pour passer de l’état dissout à l’état gazeux, le gaz carbonique a besoin de se « nucléer » autour d’une particule de matière, c’est la fameuse « nucléation ». Vu que l’enrobage du Mentos libère beaucoup de particules en même temps en solution, une grande quantité de CO2 gazeux est produite en un laps de temps très court ! En théorie, cela pourrait fonctionner avec n’importe quelle substance très soluble dans n’importe quelle boisson gazeuse, comme le sel dans la bière (version prolo) ou du sucre glace dans du champagne (version bling-bling).

Pour la réaction en chaîne… C’est en fait la seule explication que je puisse donner à la rapidité de la propagation de la nucléation dans la bouteille : les premières nucléations provoquent un changement brusque de pression dans la bouteille qui se propage en onde de choc ce qui provoque le passage subit d’une quantité exponentiellement plus importante au cours du temps (très court) ! Cette onde de choc provoque le passage subit du CO2 dissout en CO2 gazeux et…

…une tuyère trop étroite, le goulot de la bouteille, empêche la pression de s’évacuer suffisamment rapidement et la bouteille explose. Boum. Voilà.

Si le gars n’avais pas bougé ou si la bouteille s’était dirigée vers lui, il aurait pu recevoir un sacré coup… Mais ça n’est pas arrivé donc voilà, ça nous permet d’en rire un peu et surtout, d’en tirer une bonne leçon de science !

Vous voulez « énucléer » en toute sécurité ?

Comme ça je veux dire :

(Ça fait beaucoup de bouteilles et beaucoup de soda quand-même…)

D’abord, il faut le faire à l’extérieur, se munir de vêtements sales ou d’une blouse de labo, prévoir assez d’espace autour du lieu de l’expérience et porter des lunettes (pour se protéger les yeux pardi !)

Ensuite, vous suivez le mode op’ suivant :

Le jet de mousse (aussi appelé « Geyser »)

Matériel / Réactifs

  • 1 bouteille de coca light
  • 4-5 pastilles de Mentos
  • Papier collant

Mode opératoire

Attacher les pastilles de Mentos avec le papier collant de manière à ce qu’elles puissent passer d’un coup et toutes ensemble dans la bouteille de Coca. Ouvrir la bouteille de Coca, laisser tomber le paquet de pastilles Mentos dans la bouteille. S’écarter avec prestance. Observer le jet de mousse qui peut atteindre, selon les experts, trois mètres.

Remarque : si vous ne désirez pas vous encombrer avec du papier collant pour coller les Mentos, il existe sur le marché un « kit geyser » pour Mentos et Coca… Mais où va le monde ?

Geyser tube. Source : https://www.gregorypouy.fr
Geyser tube. Source : https://www.gregorypouy.fr

Oui mais… Rien de vous dérange ?

Au-delà de la partie technique du ratage, il y a 20 litres de Dr Pepper, plein de bouteilles en plastique, des Mentos gâchés… Avant d’expérimenter, il faut vraiment savoir ce qu’on veut observer, tester, apprendre. Dans ce cas je doute que le gars en sandalettes avait un but plus précis que mettre beaucoup de Mentos dans beaucoup de soda pour voir ce que ça allait donner. Donc :

Expérimentez bien ! (Mais pas bêtement.)

 

Ah ! J’en profite : j’ai ouvert un courrier des lecteurs alors, si vous avez des questions de science barrée (ou pas) je veux bien tenter d’y répondre, lâchez-vous dans les commentaires ! Je répondrai par une compilation de réponses tout aussi loufoques que vos interrogations !

What If GIF
Via GIPHY


Comment l’expliquer à mes enfants ? Commençons par le début. Le génocide a commencé le 7 avril

Je cherche un moyen d’expliquer l’inexplicable à mes enfants : pourquoi des frères et des sœurs décident de tuer leurs propres frères et leurs propres sœurs pour une idéologie, pour un dogme, pour rien d’objectif, en fait ? Je vous propose de m’accompagner dans ma réflexion afin de trouver une manière d’expliquer à mes enfants l’inexplicable.

Imigongo
Fabrication d’Imigongo. Crédits E. Leeuwerck

La vie a voulu que je voyage au Rwanda et puis que j’y reste plus de dix ans. Avec ma compagne, on y a passé de belles années, de très belles années. On a découvert le pays des milles collines et l’Afrique de l’Est en général, tellement loin des stéréotypes. Nos enfants ont grandi ici, ils ne savent pas ce qu’est la vie en Europe. Ma plus petite a 5 ans et mon plus grand fiston a neuf ans, neuf ans passés ici et il me demande, un jour « papa, c’est quoi le génocide ? ». Comme je ne sais pas comment lui expliquer pourquoi des frères et des sœurs décident de tuer leurs propres frères et leurs propres sœurs pour une idéologie, pour un dogme, pour rien d’objectif en fait, je réponds un peu lâchement « tu es un peu trop jeune… Laisse-moi le temps de prendre le temps de trouver la manière de t’expliquer ». Mais régulièrement, mon fils revient à la charge et oui, il a le droit de savoir. Il doit savoir. Je dois lui expliquer mais je ne sais toujours pas comment. Comment lui expliquer… Je ne sais pas comment lui expliquer. Mais j’y arriverai, je trouverai les mots, les métaphores qu’il faut peut-être. Mais avant, il faut que je réfléchisse, que je mette les choses à  plat, les émotions surtout… il faut que je me replonge dans mes réflexions, dans mes doutes, dans mes émotions qui ont traversé ma vie, nos vies depuis que nous sommes ici.

Je vous propose, si vous désirez lire plus loin mes lignes, de m’accompagner dans ma réflexion afin de trouver une manière d’expliquer à mes enfants l’inexplicable, l’insensé, l’immonde… L’immonde qui est en l’humain puisque ce sont des humains qui ont tenu les machettes, pas des monstres… Que ce sont des humains « normaux » qui ont planifié la Shoah, pas des psychopathes…

Comme il faut bien un début, commençons par le 7 avril, à Kanombe. Vous allez comprendre pourquoi on commence à Kanombe en lisant un texte que j’avais écrit en mai 2014 sur ce blog, ça titrait comme ça :

Machettes, pluie et mystique du massacre

Après avoir passé l’aéroport de Kanombe, en venant de Kigali, si on continue tout droit, la route débouche sur une piste en terre. Au bout de cette piste, on tombe sur une aire de stationnement devant un immense terrain entouré de barrières. C’est l’ancien domaine présidentiel de Juvénal Habyarimana qui a été reconverti en musée.

Sur les impeccables gazons de la propriété, des cérémonies de mariage sont organisées, ces évènements festifs contrastent de manière surréaliste avec le contexte historique du lieu. C’est bien ici que l’Akazu1, cercle secret de l’élite Hutu gravitant autour d’Habyarimana a été fondé. L’Akazu a été créé dans le but de planifier, préparer et mettre en œuvre le génocide de 1994. La villa au centre de la propriété est évidemment grande et pompeuse, une ambiance digne des livres d’Ahmadou Kourouma, alors que les Intore, les guerriers traditionnels du Mwami entament leurs danses, avec leurs coiffes blondes rappelant les crinières des lions, torses nus, pour le mariage qui est célébré. Alors que les percussions commencent à résonner, les collines au loin s’obscurcissent sous les nuages lourds de pluie et enragés par l’orage. Le vent se lève en trombe. Les percussions des Intore résonnent plus fort, à tue-tête, rivalisant avec le tonnerre encore lointain. Un début de saison des pluies comme les autres.

Le guide nous fait visiter la demeure avec un air indifférent, détaché. On apprendra par exemple que la petite pièce, au-dessus de la salle de sport, était celle dans laquelle le sorcier personnel du président Habyarimana était reçu pour de longues séances, on y accède par un passage secret. La couleur blanche de tous les murs de la maison était un conseil du sorcier. Ces éléments de sorcellerie peuvent paraître anecdotiques, mais ils revêtent cette dimension métaphysique de ce type de personnage, comme si le massacre de centaines de milliers d’êtres humains pouvait avoir une signification mystique. Les apparitions mariales de Kibeho au début des années 80 montrent à quel point les massacres pouvaient se transformer en message divin. Les visions des voyants étaient sanglantes, annonciatrices des tueries de 1994. Monseigneur Augustin Misago, évêque rwandais, en approuvera le culte public. Il sera accusé d’être impliqué dans les massacres de Kibeho durant le génocide2. Le Vatican n’est pas en reste et considère d’ailleurs l’Eglise rwandaise comme l’une des plus pures depuis le génocide, après s’être lavée par le sang3.

Avant d’entrer dans la chapelle de l’ancienne demeure d’Habyarimana, on observe la porte en bois massif sur laquelle est taillée un agaseke4 protégeant symboliquement la famille présidentielle. Quatre ans avant le génocide, le Pape Jean-Paul II, lors de sa visite dans le pays, viendra faire la messe entouré de la famille et proches d’Habyarimana et d’une bonne partie de l’Akazu.

Hors de la villa, il y a deux piscines, l’une était pour la famille et l’autre pour les serpents du Président. Les deux piscines sont vides. On dit que lorsque l’avion présidentiel est tombé, touché par un missile, dans la parcelle juste à côté de la propriété présidentielle, le plus grand serpent, celui du sorcier, sensé protéger le président de la mort, a disparu. En montant dans une guérite, placée à califourchon sur un mur de la propriété, on peut voir les restes de l’avion tombé en 1994. Étrange spectacle, tout est resté là, un chemin de terre passe entre les débris pour mener les vaches aux pâturages. Sur le ciment de la guérite, gravé, j’arrive à lire, « god with us, Akazu ». Je demande des explications à notre guide, elle me répond par un rire gêné, limite grinçant.

Habyarimana a été tué, avec le président du Burundi qui l’accompagnait à son retour des accords d’Arusha, pour avoir consenti un dialogue avec la guérilla du Front Patriotique Rwandais, le FPR5. Une trahison pour l’Akazu. Le point de non-retour était déjà atteint dans la mise en œuvre du génocide, les tueurs Intarahamwé6, encadrés par les Forces Armées Rwandaises (FAR), connaissaient le plan génocidaire et savaient déjà où tuer, par quartier, organisés comme lors des journées de l’umuganda, les travaux communautaires mensuels. Même le Président lui-même ne pouvait plus s’opposer au monstre qu’il avait participé à créer. On raconte encore à Kigali que Habyarimana tremblait en montant dans l’avion qui allait le ramener d’Arusha. Il connaissait le prix à payer pour avoir trahi la « maisonnée ».

L’avion du président abattu en avril 1994, ce sera le début du génocide. Cent jours de massacres intenses qui se solderont par plus de 800000 morts massacrés à la machette. A Kigali, le bruit de l’explosion de l’avion a été entendu dans toute la ville. La population en est restée terrée chez elle. Quelques heures après, la courant a été coupé dans toute la ville, des percussions ont commencé à résonner de tous côtés accompagnés des champs des Interahamwe.

A la sortie de la propriété de l’ex-président, la pluie tombe en trombe, l’orage est violent et fait peur. On n’aime pas toujours la pluie ici. Elle est assourdissante quand elle tombe sur la tôle des maisons. La pluie masquait le bruit des machettes et des cris lorsque les massacres ont commencé. Une vieille expat m’expliqua un jour qu’il y a eu une tentative de génocide dans le tout début des années 1990, mais les massacres n’aboutiront pas, les fusils utilisés n’avaient pas assez de munitions qui sont d’ailleurs trop onéreuses. Comment remédier à ce problème ? Utiliser un outil répandu dans toutes les campagnes, totalement anodin dans un pays essentiellement rural, et transformer cet objet destiné à débroussailler en arme à deux grand avantage : il ne doit pas être rechargé et tout le monde sait utiliser une machette.

1 La « maisonnée » en Kiniyarwanda

2 https://www.libertepolitique.com/vie-de-leglise/853-rwanda–les-apparitions-mariales-de-kibeho-reconnues-par-leveque-du-lieu

3 Une prière officielle louant le génocide Rwandais de 1994 est retranscrite en guise d’ introduction au livre « Le sabre, la machette et le goupillon »

4 Panier tressé en fibres de végétaux, aux formes coniques typiques de l’artisanat de la région des grands lacs

5 Guérilla à cette époque, converti en parti politique actuellement au pouvoir, formé dans les rangs de la diaspora tutsi en Ouganda

6 Milices génocidaires


C’est un début. Est-ce que je commencerais par une visite de la maison d’Habyarimana ? Je ne sais pas, je ne pense pas…

La suite bientôt, sur ce blog.

N’hésitez pas à partager vos impressions, ça peut toujours aider.


En Afrique centrale, le virus Bilima, une maladie émergente « qui tue le corps mais pas l’esprit »

L’Afrique centrale est connue pour être l’origine de nombreuses maladies qui font froid dans le dos : Ebola, fièvre de Lassa, maladie à virus Marburg ou encore le SIDA. Le virus Bilima est la moins connue de ces maladies émergentes mais pas la moins effrayante puisque, selon les témoignages « Bilima tue votre corps mais pas votre esprit« .

Le Docteur H. Van Hangenhart, ancien spécialiste en épidémiologie à l’institut tropical d’Anvers raconte : « C’était en 1972, j’avais reçu deux échantillons provenant des cadavres de deux sœurs franciscaines qui résidaient depuis des années dans la province du Nord Kivu au Zaïre (actuelle République Démocratique du Congo). Les témoins sur place, des paroissiens, ont raconté qu’elles sont tombées subitement malades d’une fièvre après un voyage de quelques jours en brousse, elles mourront toutes les deux 48 heures après le début de la fièvre, après une longue série de délires. Juste avant de mourir, les yeux des deux sœurs se sont révulsés avant que du sang ne sorte abondamment du nez. »

« Les enfants de l’école maternelle dans le Kivu » avec une soeur Fransiscaine. Source : Réseau Canopé

Le Docteur Van Hangenhart réalise des tests à l’époque sur les échantillons et isole un virus inconnu et décide de l’appeler virus Bilima suite à ce qui s’est passé après la mort des nonnes. « Ce qui m’a le plus perturbé dans les témoignages, poursuit Van Hangenhart, ce n’est pas la mort elle-même mais ce qui est arrivé après la mort des sœurs… Quelques heures après leur décès, alors qu’elles étaient encore dans ce qui faisait office de morgue au dispensaire du village, les habitants ont entendu des cris ou plutôt une sorte de longue plainte provenant du dispensaire. Le médecin belge, le docteur Schaert en charge du centre de santé a été voir ce qui se passait et il a dit avoir vu les deux nonnes debout, les yeux toujours révulsés, crier ce qui exprimait, selon lui, une souffrance atroce. Il a tenté de s’approcher d’elles pour les aider, elles avaient un aspect fantomatique, c’est pour cette raison que les infirmiers du villages nommèrent, terrifiés, « Bilima », (les fantômes en lingala, langue locale), à la vue de ces nonnes revenues de la mort. »

Docteur Van Hangenhart. Source : Institut Tropical d’Anvers

Le médecin belge, aidé de trois de ses infirmiers tentèrent bien d’immobiliser les nonnes pour tenter de les aider mais elles se défendait farouchement, tout en criant atrocement. Elles ont fini par mordre le médecin et deux infirmiers à sang. Les nonnes ne réapparurent jamais, selon les témoignages, même si des cris ont été perçus durant plusieurs nuits après leur « réveil » et leur évasion dans la brousse environnante.

« L’histoire ne s’arrête pas là, termine l’épidémiologiste tropical, visiblement ému. Le docteur Schaert était un très bon ami, nous avons fait nos études ensemble… Tous les membres du village restaient terrés dans leurs cabanes. Mais quand le docteur belge et ses infirmiers mordus ont commencé à avoir de la fièvre, il a donné l’instruction suivante au reste du personnel du dispensaire : ‘Quand nous serons morts pour la première fois, vous devrez nous enterrer loin du village, deux fois plus profondément que dans une tombe normale.’ Le docteur Schaert a même demandé que les tombes soient creusées à l’avance. Mais l’un des infirmiers, probablement effrayé par la décision de Schaert, s’est échappé… On ne l’a plus jamais revu ou en tous cas, sous sa forme incarnée… » C’est avec cette phrase énigmatique que le Dr Van Hahgenhart conclut son récit.

Un dernier témoignage ?

Là, on est en 1975. Jane Massey, qui était l’envoyée spéciale du magazine Living Earth pour lequel elle travaillait à l’époque, réalisait un reportage sur les gorilles à dos argentés au Rwanda, pas loin de la frontière avec le Zaïre. Elle raconte ce dont elle a été témoin à ce moment :

Jane Massey durant son reportage au Rwanda. Source : Earth Magazine

« Alors que nous traversions une étroite vallée, j’ai remarqué quelque chose qui remuait dans le feuillage, en contrebas. Notre guide aussi. Il nous a forcé à accélérer le pas. Soudain, j’ai « entendu » quelque chose de quasi inimaginable dans cette partie du monde : un silence total. Aucun animal, aucun oiseau, pas le moindre insecte, or là on parle d’insectes habituellement très bruyants. Du fond de la vallée montait un gémissement à vous donner la chair de poule. Kevin (le photographe de l’expédition) est devenu encore plus pâle que d’habitude, répétant ad nauseam qu’il devait s’agir du vent. Le vent… A d’autres… (…) Je peux vous assurer que ce n’était PAS le vent. Kengeri a saisi sa machette et nous a ordonné de nous taire. Je lui ai répondu que je voulais descendre pour en avoir le cœur net. Il a refusé. Comme j’insistais, il a dit dans un souffle : ‘Il y a un mort là-bas, Bilima’, avant de reprendre sa route. Kengeri me raconta plus tard l’histoire de deux nonnes qui, quelques années plus tôt dans le Zaïre voisin s’étaient enfuies après être « mortes » en faisant des cris atroces et de cet infirmier, mordu par l’une de ces nonnes qu’on avait jamais retrouvé. Je ne suis pas du genre à gober des histoires de zombie mais j’avoue que j’en avais la chair de poule à l’écoute de ces histoires. »

Massey n’explora jamais la vallée, qui ne peut, en fonction de sa configuration, recevoir de grandes goulées de vent… Mais suite à ses recherches sur place en interrogeant les habitants de la région, elle raconte que « les personnes parlent de Bilima, c’est parfois sous forme de légende ou d’histoires pour faire peur aux enfants pour qu’ils ne s’éloignent pas des maisons la nuit mais il y a des personnes qui disent avoir vu des Bilima crier, des adultes, et vous pouvez me croire, ils avaient peur en évoquant ce mot, Bilima, je sais voir la peur dans le regard des gens ».

Un risque de résurgence de la maladie, comme Ebola ou le SIDA ?

Le virus Ebola tient son nom de la rivière Ebola où il a été repéré pour la première fois en 1976 au Zaïre et depuis, la maladie est connue pour apparaître, disparaître et réapparaître à nouveau dans différentes régions d’Afrique subsaharienne. Le réservoir naturel de la maladie Ebola, c’est-à-dire le ou les animaux qui sont porteurs de la maladie en milieu naturel en dehors des humains, n’est pas encore identifié. Même si on pense qu’il s’agit, entre autres, de chauves-souris frugivores Eidolon spp., Rousettus spp. ou de rongeurs sylvestres. Pour le virus Bilima, aucune piste en ce qui concerne son probable réservoir naturel n’est évoquée scientifiquement. La maladie n’a plus été observée depuis la fin des années 1970. Cela ne veut pas pour autant dire que la maladie ait été éradiquée ou ait disparue. Les épidémiologistes sont unanimes. « Comme pour Ebola, une maladie qui est apparue à un moment, peut réapparaître, ce n’est pas parce qu’on ne voit pas d’humains malades qu’elle n’est pas là, explique Martine Peeters, virologue à l’unité multidisciplinaire UMI 233 de l’Institut de recherche pour le développement de Montpellier. Si des personnes ont été contaminées, même il y a quelques décennies de cela, ça veut dire qu’elle est là, en embuscade. On a pu voir cela avec le SIDA. »

Le SIDA est en effet un très bon exemple. La première publication sur des cas de SIDA remonte à 1981, et l’identification du VIH de type 1 (VIH- 1, le plus répandu dans le monde) à 1983. Le point de départ a été localisé en Afrique centrale, plus précisément dans l’ancien Congo belge, devenu Zaïre. Il ne faisait pas de doute que le SIDA était une forme ayant évolué à partir d’un virus du singe, passé à l’homme et sorti de la forêt. Cependant, des pans entiers du démarrage de l’épidémie restaient dans l’ombre. Pour l’éclairer, l’équipe composée de chercheurs européens et nord-américains a analysé les séquences génétiques de plusieurs centaines d’échantillons de VIH-1 prélevés dans l’ex-Congo belge, ainsi que dans des pays voisins, au cours du XXe siècle, et conservés au Laboratoire national de Los Alamos (Nouveau-Mexique). Cela leur a permis de remonter le temps en suivant l’apparition des mutations du virus en même temps que sa localisation. Ils ont confronté ces résultats à l’histoire des activités humaines dans ces régions pour essayer de comprendre les circonstances ayant permis à l’épidémie de se propager. Les résultats de cette étude ont été publiés dans la revue Science : Early AIDS virus may have ridden Africa’s rails.

« Nous avons rassemblé les pièces du puzzle pour établir où et quand le virus était passé de son réservoir animal pour passer à l’homme, résume Martine Peeters, virologue et cosignataire d’un article sur l’émergence du SIDA depuis le début du XXème siècle publié dans la revue Science. Ce passage du singe à l’homme s’était sans doute produit à plusieurs reprises sans qu’une épidémie se déclenche, le virus restant cantonné à la forêt, mais le virus s’est trouvé au bon endroit au bon moment, et l’épidémie a démarré. En l’occurrence, la souche à l’origine de la pandémie avait pour hôtes des chimpanzés vivant dans le sud-est du Cameroun. Aux alentours de 1920, un homme contaminé (par consommation de viande de brousse ou par une blessure alors qu’il chassait) a voyagé jusqu’à Kinshasa, qui allait être le berceau de l’épidémie. L’examen des archives coloniales a montré le développement intensif à cette époque des échanges commerciaux par voie fluviale entre ces deux régions, notamment pour le commerce de l’ivoire et du caoutchouc.

Colon belge et ses porteurs. Source : lecomptoir.org

Puis, des années 1920 aux années 1950, l’urbanisation et les transports, en particulier ferroviaires, ont pris leur essor, en lien notamment avec l’industrie minière. Kinshasa devenait alors une plaque tournante. En 1937, l’ancêtre du VIH-1 pandémique a commencé à être retrouvé à Brazzaville, la capitale de l’ancienne colonie française du Congo, située à 6 kilomètres de Kinshasa, de l’autre côté du fleuve Congo. Vers la même époque, le virus se dissémine à d’autres grandes villes de l’actuelle République démocratique du Congo situées au sud-est de Kinshasa. D’abord Lubumbashi, pourtant plus éloignée, puis, environ deux ans plus tard, à Mbuji-Mayi, le tout suivant la voie ferroviaire. Empruntée par plus de trois cent mille personnes par an en 1922, cette ligne de chemin de fer, traversant d’ouest vers le sud-est le pays, en transportait plus d’un million en 1948. Au cours de la décennie suivante, c’est par la voie fluviale que le virus gagne Bwamanda et Kisangani, dans le nord- est du pays.

Les activités humaines, le travail migrant, le développement d’activités de prostitution et la pratique d’injections de traitements contre les infections transmises sexuellement avec du matériel non stérile (seringues et aiguilles réutilisées pour plusieurs personnes) ont constitué les facteurs d’amplification de l’épidémie naissante.

La présence d’Haïtiens venus travailler au Congo-Kinshasa, qui venait d’accéder à l’indépendance en 1960, explique que certains d’entre eux aient importé le virus dans leur pays à leur retour, aux environs de 1964. A partir de là, le virus a gagné les Etats-Unis, tandis que dans le même temps, il se propageait à d’autres pays d’Afrique subsaharienne. La suite est connue. Le virus a infecté 75 millions d’individus à travers le monde et a causé la mort de 36 millions de personnes.

Et en ce qui concerne le virus Bilima ? Si des humains ont été victimes de ce virus ça veut dire qu’il est adapté à son nouvel hôte humain. C’est dès lors une question de contexte pour qu’une épidémie voire une pandémie puisse surgir. Et le contexte actuel du Kivu y est propice : la région est parcourue depuis des décennies par de violents groupes armés semant chaos et terreur sans que la communauté internationale ne puisse agir de manière efficace.

Un grand nombre de civils trouvent refuge dans la forêts et dans des camps de réfugiés aux conditions extrêmement précaires. On peut véritablement parler de guerre oubliée dans le Kivu, 134 groupes armés ont été recensés dans le Nord du Sud Kivu, les massacres sont monnaie courante et on parle, en termes de victimes, du plus important conflit depuis la deuxième guerre mondiale.

A lire aussi : Sida : où, quand et comment la pandémie mondiale est-elle née ?

🐠


Mesure la vitesse de tes réflexes avec le « réflexomètre »

Issu de la recherche la plus poussée en matière de pédagogie des sciences, le réflexomètre vous permet de mesurer le temps que prend un réflexe pour s’effectuer.

Et voici la bête : une échelle de mesure du temps (en millisecondes) avec de superbes dessins (Aaaaah ! Le design des schémas pédagogiques de biologie, tout un style !)

reflexometre
Le réflexomètre à imprimer en format A4

Cette feuille, à imprimer en format A4, doit être plastifiée ou collée sur une carton pour fabriquer votre réflexomètre. (Et le réflexomètre en pdf est ici : reflexometre.pdf)

Comment ça marche ?

C’est très simple. Un « expérimentateur » tient la feuille par le haut alors qu’un autre personne, le « cobaye » (la personne de qui on mesure la vitesse des réflexes) devra placer ses doigts au niveau « 0 » de l’échelle de temps.

Reflexometre2
Bien tenir le réflèxomètre

Attention, il faut placer les doigts en pince sans tenir la feuille (sinon c’est tricher ;-)).

reflexometre3
Placer les doigts « en pince » au niveau « 0 » sans tenir la feuille

Dès que l’expérimentateur lâche le réflexomètre, le cobaye tente de l’attraper le plus rapidement possible et ensuite on regarde la valeur sur laquelle les doigts ont arrêté le réflexomètre ; ici, 215 millisecondes :

Reflexometre GIF

Mais finalement, on mesure quoi ?

Le temps que prend un message nerveux sensitif pour aller des yeux vers le cerveau qui lui, va analyser le message, décider quoi faire et envoyer sa réponse sous forme de message nerveux moteur vers un (des) organe(s) effecteur(s) qui dans notre cas, sont les muscles des doigts qui devront attraper le réflexomètre. Et tout ça en maximum 230 millisecondes pour les plus lents ! Rapide, non ?

Un petit schéma et ça passera mieux (ici, le cas d’un footballeur avec un cerveau) :

nerf moteur sensitif
Mise en relation des organe de sens, cerveau et organes effecteurs, source : lewebpedagogique.com

Et encore : j’adore le design des schéma de biologie des manuels scolaires, tout un style !

Petite remarque sur la terminologie « réflexe »

Typiquement, un réflexe est une réponse musculaire involontaire (mais aussi stéréotypée et, évidemment, en réaction à un stimulus) qui est produite par un « arc réflexe » sans intervention du cerveau (un « arc réflexe » peut passer par la moelle épinière, c’est le cas lors du retrait d’un membre qui ressent une douleur) ou de la volonté consciente. Il est clair que lors des premiers essais avec le réflexomètre, la décision de saisir la feuille qui tombe est consciente mais cependant, elle deviendra de plus en plus automatique avec la pratique et deviendra donc, un réflexe au sens plus strict.

Action !

Vous pouvez organiser ça avec plusieurs personnes sous forme de concours mais pour être le meilleur en réflexe des doigts, je vous recommande un sacré entraînement, de l’aérobic (et j’adore l’aérobic alors je vous préviens, je vais essayer de faire un billet sur l’aérobic la semaine prochaine !) :

Moi, ma moyenne, c’est 125 ms ! (mais seulement après une heure d’aérobic en guise d’entrainement)

Vous, vous faites mieux ?

Vivement la semaine prochaine !

Crédits photos et gif : sproutchlagrenouille


Ratage de science : électrocution en plein cours de physique

En vérifiant le montage de sa démo d’électricité, un prof se prend une décharge, et c’est super drôle !

Oui, on pourrait croire que je suis sadique (oui, je dois bien l’être un peu, j’aime bien regarder des vidéos où des gens se font – un peu – mal) mais si vous, vous allez rire, c’est bien parce que cette petite décharge sur le prof est vraiment drôle, objectivement je veux dire, constatez plutôt :

Alors, drôle hein ?

Et le Gif du moment du drame :

Electricity Fail GIF

Alors, que s’est-il passé ? Bon, oui, la vidéo est de très mauvaise qualité mais on voit quand-même une lueur bleue qui accompagne la décharge, ce n’est donc pas que le prof met bêtement ses doigts sur son transformateur pour savoir s’il fonctionne, ça ressemble plutôt à une expérience d’accumulation de charges statiques du genre « Générateur de Van de Graaff » :

Pas mal hein ! Recevoir des décharges, ça fait un peu mal, je parle d’expériences personnelles, j’ai aussi joué avec un générateur de Van de Graaff, mais ça va, c’est rigolo quand-même.

Quelqu’un qui prend les fortes électrocutions au sérieux, c’est Mehdi Sadaghar, une Ingénieur fou qui teste sur lui différents phénomènes électriques sur sa chaîne YouTube « electroBOOM », un vrai sacrifice pour la science et nos zygomatiques :

Evidemment :

NE FAITES PAS CA A LA MAISON !!!!!

Merci.

MISE A JOUR 24 MARS 2019

Je tenais à répondre à deux commentaires sur la page FB du Café des Sciences au sujet de ce billet.

On me signale premièrement que « Sur le campus de Jussieu à Paris (Sorbonne Université), le bâtiment d’ingénierie port le nom de Félix Esclangon, mort électrocuté devant ses élèves en 1956″ ainsi que « Des élèves filment en cours et se moquent. La vidéo est partagée et commentée « … et c’est drôle » … bizarre mais je ne ris pas du tout. »

Alors… Il est clair que nous, profs de science, nous sommes amenés à faire des expériences qui comportent un certain danger et c’est à nous, enseignants d’évaluer le risque auquel on s’expose avec les élèves/étudiants ; l’histoire de Félix Esclangon est tragique et il est la preuve qu’on ne peut pas tout contrôler et qu’un accident est malheureusement toujours possible. J’ai moi-même eu de sacrées sueurs froides (je devrais faire un post sur mes gaffes, accidents et ratages en classe) quelques fois, surtout en début de carrière où le manque d’expérience, la précipitation et le stress peuvent nous amener à mal évaluer le risque. Mais bon, dans le cas de la vidéo partagée dans cet article, je ne pense pas que le prof soit en danger s’il réalise bel et bien une expérience de magnétisme et je ne partagerais pas une vidéo d’un prof prise à son insu qui serait de plus, victime d’un accident grave. En ce qui concerne l’élève qui a filmé, vu l’angle de prise de vue, il ne semble pas se cacher et a probablement été autorisé à filmer. (Avant que les téléphones ne soient interdits dans mon école, j’autorisais les élèves qui le désiraient à filmer mes expériences en classe.)

Pour placer ce post dans son contexte, je suis passé à deux doigts de me faire électrocuter en classe cette semaine devant les élèves, non pas à cause d’une expérience, mais à cause d’un câble de multiprise défectueux qui a provoqué un court-circuit à quelques centimètres de mon pied… J’ai eu une belle trouille et je vous assure que mes élèves n’ont pas du tout rigolé… j’ai écrit ce post pour dédramatiser 😉


Ratage de science : l’excellente idée d’enflammer une bouteille de 20 Litres de vapeurs d’isopropanol

Un prof de chimie enflamme une bouteille de 20L contenant des vapeurs d’isopropanol, est-ce que ça peut finir bien ? Bien-sûr que non ! Encore un ratage de science analysé avec images à l’appui, ralenti et Gif des moments clés. 

Ratage de science à l'Isopropanol. Capture d'écran youtube.
Ratage de science à l’Isopropanol. Capture d’écran youtube.

Voici le contexte (hypothétique, mais basé sur mon expérience de prof de sciences) : des élèves ont dû tanner à fond un prof de chimie pour qu’au moins une fois dans l’année, il réalise une expérience avec du feu et si possible que ça puisse exploser. C’est le dernier vendredi après-midi avant les vacances de Pâques et le prof cède avec un mou « bon d’accord ». Il prépare vite fait une expérience où il verse un fond d’isopropanol (qui est un nom erroné en fait, on préfèrera dire alcool isopropylique) dans une bouteille en plastique de 20L. Il se dit que bon, puisque la bouteille reste ouverte, il n’y a pas de risque d’explosion, le surplus de pression dû à la dilatation des gaz en combustion et de la chaleur sera évacué par le goulot, comme une tuyère. Mais non :

On voit quand-même vers le début de la vidéo que le prof a l’air agacé et n’est pas trop sûr de lui : il confie un extincteur à une élève. La combustion de l’isopropanol prend un certain temps avant de se mettre en route, une partie a probablement diffusé hors du récipient, il doit enfoncer un peu plus loin dans la bouteille son espèce de chalumeau, ce qui est assez dangereux pour l’enseignant vu qu’il doit se rapprocher de la bouteille et de fait, le gars va être carrément soufflé par l’explosion de la bouteille qui a suivi un tout début de combustion ! Les élèves, se sont littéralement enfuis du local (ce qui n’a pas manqué d’être fait dans une joyeuse ambiance :-D) et heureusement, ils avaient été mis en retrait de l’expérience par le prof. Dernière chose rigolote, ce n’est pas la fille à qui on avait confié l’extincteur qui se charge d’éteindre le feu, elle a probablement foutu le camp apeurée, c’est le prof qui s’en est chargé ; il est tout à fait normal que ce soit l’enseignant qui s’en charge en fait.

Animated GIF

Comment faire pire que ça ?

Qu’est-ce qui serait pire qu’enflammer des vapeurs d’isopropanol dans une bouteille en plastique de 20 L ?
Enflammer des vapeurs d’isopropanol dans une bouteille en verre bien sûr ! Et c’est ce qui a été fait dans la vidéo qui suit… Et ça ne se termine pas bien, une sorte de (ratage de science)2 ! En plus de cela, le contexte est intéressant : ambiance de début des années ’90, le prof a l’air de préparer une manip et, pionnier vidéo-scientifique, il filme ses expériences avec un caméscope sur cassette VHS :

« Waw, are you OK ?« . Moi, je dis juste que le type a eu une chance de fou ! Il aurait pu sacrément se blesser avec un éclat de verre. En plus de cela, sur l’avant de sa paillasse, il y a un ballon avec un liquide en ébullition dedans, une énorme bouteille brune de l’autre côté de la table (ces bouteilles sont utilisées pour les réactifs méchants… Serais-ce sa réserve d’isopropanol ? Si c’était le cas et qu’elle serait tombée en se cassant par terre, il aurait facilement fait exploser son labo ou tout au moins, l’incendier dans les règles, lui et ses amis avec !). Il n’a pas non-plus l’air d’avoir d’extincteur, il se charge d’éteindre son désastre comme si il soufflait les bougies d’un gâteau d’anniversaire. Un ratage de science qui a été à deux doigts de virer au drame…

Explosion Fail GIF


Faire ce genre de manip mais en prenant moins de risques

Cette expérience est un classique des manips en classe. Mais pourquoi est-ce qu’il y a un risque d’explosion ?

  • Quand on ne dilue pas le liquide inflammable avant de le vaporiser dans la bouteille : la présence d’eau dans le mélange va ralentir la combustion, tout simplement ! En ce qui concerne l’isopropanol, une dilution de 30% eau et 70% isopropanol est vraiment correcte. Si vous désirez faire l’expérience avec de l’éthanol, 70% est une bonne concentration aussi.
  • Quand l’oxygène est en excès ou en proportions stœchiométriques : rholalala ! Du vocabulaire barbare ! Mais le concept est simple : un gaz combustible ne brûle pas sans oxygène, de fait. Mais dans certaines proportions précises, celles qui correspondent à l’équation chimique (stœchiométriques) le mélange éthanol-oxygène (dans l’air) brûle tellement bien (et donc, vite) qu’il peut mener à une explosion (au lieu d’une combustion moins rapide) :

C2H5OH + 3O2 –> 2CO2 + 3H2O + Energie

  • Comment minimiser le risque d’explosion ? En plaçant un excès de gaz inflammable en versant une quantité importante de substance liquide dans le récipient et en prenant le temps de secouer le récipient dans tous les sens afin de maximiser la vaporisation ; en versant une solution diluée à 70% de substance inflammable (éthanol ou alcool isopropylique), la combustion sera également ralentie grâce à la présence de 30% d’eau dans le mélange.

Flinn, avec ses collègues Catherine et Steve ont fait une vidéo là-dessus. Vous allez voir, le style est excellent ! Lunettes de labo, polo et pantalon remonté dessus, « safety first »

Chemistry Whoosh GIF

C’est plein d’humour de laborantin mais surtout, les précautions de sécurité pour réaliser l’expérience de la bouteille en feu (Whoosh bottle) sont bien explicitées :

Sinon, pour finir, j’avais testé le même genre de manip mais avec un long tuyau transparent ouvert des deux côtés dans lequel on avait, avec l’incroyable Alex, laissé s’écouler du butane, le gaz que l’on retrouve d’habitude dans les bonbonnes pour cuisinière, ça a donné un superbe effet et une super manip ! La manip en soi est impressionnante et n’est pas dangereuse si les conditions de sécurité minimales sont respectées : avoir un extincteur à proximité, travailler dans un local aéré, contrôler la valve de gaz et surtout, ne pas oublier que des gaz qui s’enflamment se dilatent en pleine combustion et peuvent causer des brûlures graves et/ou des explosions si ils sont enfermés dans un récipient, avec ou sans ouverture !

Bonnes expérimentations !

Et la semaine prochaine, on se retrouve avec une expérience qui permet de mesurer nos réflexes !

 

 


Ancien prof de chimie, il monte son labo de fabrication de drogues dans son grenier

Ça se passe en Sibérie, un ancien prof de chimie est condamné à 11 ans de prison pour avoir fabriqué 20 kilos de drogue dans son grenier et pour posséder de quoi en faire deux fois plus. Et moi je me demande : pourquoi je ne ferais pas la même chose que ce prof ?

Darth_Vader
SWCA – Darth Vader! Star Wars Celebration in Anaheim, April 2015 ; Wiki Commons

 

« Qu’est-ce que tu as encore fait ? » me demande ma chère collègue de français Madame B après m’avoir envoyé l’article du journal Le Soir titré « Un ex-prof de chimie condamné à 11 ans pour avoir monté un l… » (le titre est interrompu car ma collègue m’a envoyé le lien de l’article par WhatsApp, arf.)

https://www.youtube.com/watch?time_continue=41&v=_Mpz3_JWwy8

Pfffff. De la méthamphétamine apparemment. Enfin, je sais ça car oui, moi aussi j’ai regardé la série Breaking Bad, et j’ai beaucoup aimé. Ce fait divers en Sibérie (fait d’hiver en Sibérie, joli !) fait bien évidemment penser à cette série culte mais une question me revient souvent : « Est-ce que je me vois faire de la drogue pour gagner de l’argent ? » Oui, je me pose la question. Surtout quand les élèves me mettent dans la situation suivante (déjà évoquée sur ce blog quand je me suis rendu compte que Walter White apparaissait avant Werner Heisenberg sur les moteurs de recherche lorsque je cherchais une image sexy d’Heisenberg) :

– Hé M’sieur, vous savez faire de la drogue ?

– Euh, non.

– Ouais c’est ça, vous mentez ! Je suis sûr que vous en faites dans votre labo quand les élèves sont partis, ou alors dans votre maison.

– Eh bien non, au risque de te décevoir…

L’élève prend la classe à témoin :

– Allez M’sieur, ne faites pas l’innocent !

– Eh bien, si je savais en faire, est-ce que tu crois que je serais toujours prof ?

– Aaaaah ! C’est vrai vous ne savez pas en faire… A moins que….

– A moins que quoi ?

– A moins que votre métier de prof ne soit une couverture !

– Tu racontes n’importe quoi !, je réponds en rougissant car je me sens flatté que mes élèves m’estiment capable de monter un labo compliqué pour faire de la drogue ; je poursuis :

– Bon allez, bande de morveux, continuez vos exercices de stœchiométrie.

– C’est vous la stœchiométrie !

– Pfffffffffff…

 

Est-ce que j’ai les compétences pour produire de la drogue ? Hum… Oui. Peut-être pas de bonne qualité mais oui, j’ai les compétences pour en faire.

Est-ce que je suis capable d’en faire ? Hum… Bonne question. Et là, je fais intervenir le paradigme du « Côté obscur de la Force » :

darth vader spaceship GIF
Darth vader spaceship – Giphy

Une formation scientifique donne effectivement les compétences pour réaliser des choses pas toujours éthiques (et pas seulement les formations scientifique en fait mais dans le contexte de ce blog, j’envisage la voie scientifique)… Je ne vais pas trop entrer dans le débat de ce qui est éthique en science ou pas mais globalement, on arrive toujours, à un moment de sa vie professionnelle à se poser cette question : qu’est-ce qui me pousse à exercer une activité à caractère « scientifique » : le souci (souvent idéal) de l’intérêt général, ou bien l’appât du gain et de la renommée ? Il y a souvent une combinaison des deux mais qu’est ce qui prédomine le plus sur nos motivations ?

En tout cas, et pour prendre un cas de figure extrême, je pense qu’utiliser ses compétences de chimiste pour fabriquer de la meth, c’est sombrer du côté obscur de la force : l’appât du gain sans éthique (car science sans conscience… oui oui, vous connaissez). Ça serait un peu comme Thomas Midgley Jr., le chimiste inventeur du tétraéthyle de plomb, l’additif antidétonant à mettre dans l’essence à la place de l’éthanol (l’éthanol est aussi assez efficace comme antidétonant mais n’importe quel agriculteur peut en fabriquer ; voir « L’histoire secrète du plomb » de Jamie Lincoln Kitman aux éditions Allia, 2005) ; Midgley a délibérément caché les effets néfastes du plomb sur la santé humaine et a réussi à commercialiser massivement son produit.

Est-ce que je pourrais tomber du côté obscur de la force ? C’est-à-dire est-ce que moi, père de deux enfants, marié et prof de science heureux, pourrais-je me décider à fabriquer de la drogue pour gagner plus d’argent ? Eh bien dans l’absolu, non. Bon, j’ai bien fait des trucs pas trop légaux comme compter des chauve-souris menacées alors qu’on me l’avait interdit (et puis maintenant je ne peux plus le faire, les roussettes paillées ont déserté Kigali suite à la destruction de leurs sites de repos diurnes). Et puis, oui, j’ai déjà fait de la drogue : j’ai brassé pendant plus de deux ans ma propre bière avec mes élèves, c’était un projet pédagogique qui aidait à financer des voyages scolaires, l’appât du gain.

Et aussi, je fais du savon et des shampoings en barre avec un ami, on multiplie les pains :

savons et shampoings en barre
Je brasse les lingots, à moi les pépètes

Mais dans l’absolu donc, non, je ne fabriquerais pas de drogue autre que de la bière, sauf si…

…sauf si j’apprenais que j’avais une tumeur maligne du rhinopharynx à cause d’avoir trop inhalé le formol qui se dégageait des vieux récipients avec les animaux morts dedans, dans la réserve de mon local de BIO (depuis que je sais que le formaldéhyde est cancérigène, j’ai remplacé toutes les solutions de conservation organiques par de l’éthanol) et pour en avoir inhalé durant mes études pour les cours d’entomologie lors de la mise à mort de malheureux insectes dans ma chambre avant de les mettre en boite dans des postures aberrantes et qu’à cause de ces foutues inhalations il ne me resterait plus que deux ans à vivre, que je n’aurais pas de quoi payer mes soins ultra-chers avec mon assurance santé foireuse, et que, en même temps, mes enfants voudraient faire des études super chères de pilote d’avions de ligne au Qatar et qu’arrondir mes fins de moins comme employé au car-wash du quartier ne suffirait plus à assurer un avenir à ma famille même combiné au salaire de ma femme… (Et puis, si j’avais un cancer du rhinopharynx, je serais totalement incapable de dire une phrase aussi longue sans m’étouffer)…

Et c’est le côté obscur de la santé qui me ferait m’étouffer.

Et vous ?  Le côté obscur de la force vous séduit ou pourrait vous séduire ? Je suis curieux de lire vos commentaires !

La semaine prochaine sur ce blog, on analysera un ratage de science : enflammer une bouteille de 20L remplie de vapeurs d’isopropanol !

Et que la Force soit avec vous.


Ratage de science : la fusée à eau et les raisons d’un drame

Même l’expérience de la fusée à eau peut être dangereuse et mener à un ratage, la preuve en images avec une séquence vidéo, un ralenti du moment où ça tourne mal et une analyse des raisons du drame.

Ratage de science : la fusée à eau
Source : Fail Army « Science fail », Screenshot Youtube

C’est une expériences des plus populaires à l’école pour expliquer le phénomène physique d’action-réaction : la fusée à eau ! Pour comprendre le principe d’action-réaction, pour avoir en détail le mode op’ et faire décoller une fusée à eau, rendez-vous ici :

Bouteilles sous pression : fusées à eau !

Mais même avec une expérience aussi facile à mettre en œuvre, des accidents peuvent arriver, voyez plutôt avec le montage vidéo suivant, compilé à partir de la chaîne « Fail army » :

Héhé :-). Dans le première séquence, (à 0:04) on voit même les professeurs rigoler et dans la deuxième, les ados aux voix grailleuses, (faux)amis de l’expérimentateur se tordre de rire (à 0:18) à la vue de leur ami souffrant d’un accident d’expérimentation mettant en péril sa capacité à se reproduire.

Explication du ratage :

Pourquoi ça a raté ? En fait, l’expérience n’a pas tellement raté, dans les deux cas, elle a bien fonctionné, mais ce sont surtout les conditions de sécurité qui n’ont pas été respectées :

Il ne faut pas se mettre près de l’endroit du décollage et encore moins rester dans la trajectoire de l’engin ! Mais surtout : poser la fusée à eau sur un support stable avant le décollage. 

Car oui, dans les deux cas, tout allait bien jusqu’à ce que la bouteille perde l’équilibre, les ailerons que l’on a l’habitude de placer en bas des fusées à eau ne sont en général pas suffisants pour supporter le poids de la bouteille remplie d’eau. Aussi, lorsque la bouteille est sous pression, elle se déforme et les ailerons bougent. Donc, un support externe est nécessaire pour éviter les accidents.

Et pour finir, juste par plaisir (sadique ?), voici deux Gif qui reprennent les meilleurs moments :

Animated GIF

Animated GIF

Une distance de 3 à 4 mètres par rapport au lieu du décollage est suffisante pour éviter ce type d’accident et pour anticiper un choc si, malgré tout, la fusée se dirige vers une personne. Et puis, utilisez un support !

Bonne expérimentation !


Un arc-en-ciel avec un peu de naïveté dans ce monde de brutes

[Cliché en Nouvelle Pangée] C’est d’autant plus beau que c’est naïf : un arc-en-ciel nait sur une colline dans un nuage à Kigali.

Arc en ciel Kigali
Arc-en-ciel sur une colline de Kigali. CC E. Leeuwerck

Kigali, Rwanda, 18 décembre 2018. En Nouvelle Pangée, sur une petite colline, il pleut, juste sur cette colline-là. L’air est devenu froid, d’un coup et puis le vent s’est levé puissant et il a plu ; et un début d’arc-en-ciel est apparu. Et après une à deux heures, il a refait de nouveau chaud, très chaud. Ces variations brusques à Kigali, c’est récent, changement climatique oblige.

On pourrait se dire que la petite colline sur laquelle il pleut est celle de ceux qui n’ont pas de chance, mais ils ne savent pas que depuis leur colline, on aperçoit un arc-en-ciel, là, juste dans le nuage qui tombe sur eux. Ils ne verront jamais non-plus cet arc-en-ciel si ils restent là, ils devront changer de point de vue, voyager un tout petit peu pour se mettre entre le nuage et le soleil pour la voir, leur chance.

C’est un peu comme ça dans la vie, nos petits et grands malheurs cachent parfois les bonnes choses : on ne pense pas assez aux gens qui nous entourent, à ceux qui pensent à nous, bienveillants, on grimace à l’amertume d’une bière au lieu de profiter de sa fraîcheur et on ne prend plus le temps de rire ou de sourire, de s’arrêter, humer l’air après la pluie, emplir nos sens, pour se dire qu’on est là et qu’on a de la chance.

En Nouvelle Pangée, il y a de belle choses aussi. Je tenais à vous le dire pour cette soirée de Noël.

Nouvelle Pangée. Il y a 250 millions d’années, les surfaces immergées de la planète étaient réunies en un supercontinent, la Pangée.  La tectonique des plaques a fracturé et séparé la Pangée en continents. Les segments à la dérive ont lentement développé des écosystèmes uniques avec leur propre biodiversité. Et puis, les humains ont commencé à se déplacer sur la planète. Les continents qui avaient été écologiquement isolés pendant des millions d’années sont reconnectés par les mouvements physiques des humains et ce qu’ils transportent : tout et rien. Le monde n’allait plus jamais être le même, connecté et affreusement uniforme. Bienvenus en Nouvelle Pangée.


Comment expliquer à mes enfants qu’il y a des racistes en Belgique ?

Le 16 décembre 2018, la peste brune était de retour en Belgique avec 5500 militants d’extrême-droite qui crachaient leur haine à Bruxelles. Ça m’a fait flipper et je me suis demandé : comment vais-je expliquer à mes gosses qu’il y a des racistes en Belgique ?

Quand je dis « raciste », je parle évidemment de ces 5500 énergumènes qui se sont réunis le 16 décembre 2018 à Bruxelles pour éructer leur haine à coup de « notre peuple d’abord » en se pavanant en dessous de leur bannière au lion, un animal qui n’a jamais été observé à l’état sauvage sur le territoire de ce qu’on appelle aujourd’hui la Belgique.

Mais pas seulement

Je veux aussi parler de ces racistes qui n’en sont pas, de ceux qui disent « je ne suis pas raciste mais (…) », ces personnes respectables qui préfèrent parler de la pluie plutôt que de se taire parce que c’est tellement plus convenable.

Vous voyez, mes enfants n’ont pas la gueule du petit belge stéréotypé « tête blonde » et « peau sujette aux coups de soleil faciles », mais ils sont belges. Leur maman qui est aussi ma femme (terme approprié selon la culture patriarcale) est Belge aussi mais d’origine latino-américaine et pour ne rien arranger, nous vivons depuis une décennie en Afrique. Mes enfants ont toujours connu l’Afrique et ils ont de la Belgique une idée aussi vague qu’idéalisée. Ils ne font pas de calculs trop compliqués au sujet de l’origine des gens. Par exemple, Stromae, héro incontestable pour ma famille et mon fils en particulier qui a eu la chance de le voir en concert, est Belge et Rwandais ; pour mes enfants, ce n’est pas que l’artiste est 50% de l’un et 50% de l’autre, non, il est Belge et Rwandais, les deux en même temps, c’est tout. Cependant, pour avoir vécu plus de la moitié de ma vie en Belgique, je sais que le Belge moyen n’a pas toujours ce point de vue pragmatique et je vais développer ça par quelques exemples.

Racist card
CC : Santeri Viinamäki via Wikimedia Commons

Venons-en aux exemples de racisme ordinaire

Quand mes grands-parents osaient sortir de leur patelin wallon pour venir nous rendre visite à Bruxelles, ma grand-mère à peine débarquée de son train était la première à oser, devant tous les gens différents que l’on voyait à Bruxelles un « mais enfin ces quoi tous ces bougnoules, on n’est même plus chez nous, c’est incroyable ». La génération de mes grands-parents, je la retrouvais réunie lors des enterrements de mes grands-oncles et grands-tantes et ils étaient une sacrée ribambelle. Lors de ces joyeuses réunions familiales, les vétérans avaient pour habitude de s’invectiver une fois l’amertume de la perte assumée. Les deux côtés linguistiques de la familles s’affrontaient à coup de « franskilloen », terme péjoratif à l’encontre des francophones et de « flamingands » rageurs contre les néerlandophones et cela, sous le regard sévère d’un portrait de l’Oncle Alphonse haut perché sur un mur, héro familial, parti comme père blanc au Congo. Quand j’ai présenté à cette joyeuse famille ma femme, une grand-tante s’est approchée d’elle et a touché ses cheveux noirs en lui demandant « ce sont vraiment tes cheveux ? » Dans ce cas, je ne sais pas si on doit véritablement parler de racisme ou plutôt de quête d’exotisme, les deux étant quand même un peu liés. J’avais en tous les cas prévenu ma femme que ma famille était un peu bizarre mais je ne m’attendais pas à cette sorte de scène de film. Un oncle a tenté de nous rassurer avec ces mots : « ah bah, heureusement que ça n’est pas une arabe ». Je tiens à saluer au passage ma femme et son courage pour ne pas avoir pris ses jambes à son cou suite à cette rencontre avec mes aïeux.

J’ai aussi été étonné de constater que quelques Belges d’origine turque n’aimaient pas certains Belges d’origine maghrébine et vis-versa, que certains Belges d’origine maghrébine traitaient de « hazé » avec un sous-entendu esclavagisant ce qu’on nomme communément un « noir » en Belgique. Ça finissait souvent en bagarre. Un jour, un certain Bilal avait lancé l’insulte de « hazé » et il n’avait pas l’air gêné par le fait que son propre nom célèbre Bilal ibn Rabah le premier muezzin musulman, et qui de plus était « noir ».

Et des exemples, j’en ai encore à la pelle. Mais je voudrais terminer sur celui-là : une après-midi pluvieuse, une famille d’origine africaine s’est faite expulser de sa maison dans ma rue : meubles, enfants, tout et tout le monde étaient sous la pluie. J’étais gamin et on regardait lâchement ce malheureux spectacle derrière les rideaux et là j’entends « haha ! Les nègres sont dehors ».  Je demande à mon oncle pourquoi il dit ça et il me répond « mais c’est pour rire hein ! ». D’accord, lui non-plus n’est pas raciste.

Bien évidemment, je ne veux pas prétendre que tous les belges sont racistes, loin de là. Il y a des groupes de réflexion et des militants actifs contre le racisme et la xénophobie cependant, je tenais à mettre le doigt sur certains d’entre nous et nos petites réflexions, ces attitudes qui sous couvert d’humour, de normalité sont racistes sans être qualifiées en tant que telles.

Finalement, c’est quoi le racisme ?

Eh bien oui, il fallait bien poser la question à un moment. C’est évidemment cette idée que les races humaines ne sont pas égales, que certaines sont supérieures et que d’autres sont inférieures. Mais personne n’est arrivé à définir précisément quelles sont ces races au sein de l’humanité (sauf si tu fais partie des 5500 énergumènes de la manif du 16 décembre et qui tu préférerais, pour préserver la pureté de ton sang, vivre avec tes cousins et tes cousines dans une grotte, comme le lion des cavernes européen qui lui, a effectivement déambulé sur le territoire de l’actuelle Belgique mais au Pléistocène). Pourquoi est-ce qu’on n’arrive pas à cerner les races ? Tout simplement parce qu’il n’y en a pas. Toute l’absurdité de la classification de l’humanité sur base de blancs et de noirs se résume dans les propos de ma fille : « papa, si un noir a des enfants avec une blanche, ça donne des enfants gris », rire d’enfant. Du haut de son innocence, ma fille démonte par l’absurde plusieurs siècles de pseudo-science raciste : le gris chez les humains ça n’existe pas et donc, le noir et le blanc non-plus.

Je ne sais pas comment je pourrais expliquer à mes enfants ce qu’est le racisme et comment leur dire de surcroît qu’ils vont croiser la route de racistes en Belgique. Ils vont apprendre à reconnaître ces petites nuances de langage, à ne pas se laisser dévaloriser par des attitudes mesquines et à savoir s’entourer des bonnes personnes. Le racisme aujourd’hui, c’est probablement ne pas assumer ce qu’on est et d’en rejeter la faute sur les autres, ceux qui sont différents ; c’est avant tout de la haine ordinaire.